URBANISTE, fiche métier APEC

Depuis le 16 juin 2015, il existe enfin une fiche métier Urbaniste sur le site de l’APEC !

Ce document a été réalisé par l’APEC* avec la participation de la SFU*. Il s’agit d’un long travail auquel ont participé pour la SFU Laurence Garrigues, Anne Bouche Florin, Jean Pierre Gautry et Jacques Vialettes. Le Conseil d’Administration, d’autres urbanistes SFU et les enseignants de l’Institut d’urbanisme de Lyon ont contribué aux relectures et ont apporté des compléments. Anne Michèle Donnet, Sarah Cohen et Laurent Vigneau ont accepté de jouer les témoins.

Pour bien comprendre ce document:

  • Ce n’est pas un document officiel ni normatif. Sa perspective est l’emploi des cadres (l’objet de l’APEC).
  • Il propose un large état des lieux de la profession dans ses exercices actuels, y compris des ouvertures récentes ou marginales.
  • Il répertorie les compétences de façon détaillée pour créer des ponts possibles avec d’autres professions. La démarche de l’APEC est de chercher à créer de la fluidité dans l’emploi des cadres : si vous regardez les emplois proposés en lien avec cette fiche, il ne s’agira pas seulement d’emplois d’urbaniste. Certains pourront même vous sembler assez lointains mais, à la réflexion, ils demandent les mêmes qualités.

La Convention que la SFU a signé avec l’APEC prévoit d’autres actions, en particulier à destination des publics universitaires. La SFU a proposé que ces actions soient organisées avec les Instituts d’urbanisme de l’APERAU* et que l’OPQU* y participe.

* Sigles et acronymes utilisés ci-dessus :

APEC : Association Pour l’Emploi des Cadres

SFU : Société Française des Urbanistes

APERAU : Association pour la Promotion de l’Enseignement et de la Recherche en Aménagement et en Urbanisme

OPQU : Office Professionnel de Qualification des Urbanistes

Pour consulter la fiche métier Urbaniste sur le site de l’APEC, cliquez ici.

 

Témoignages

ANNE MICHÈLE DONNET, DIRECTRICE DE L’AGENCE D’URBANISME SUD BOURGOGNE
« Nous travaillons sur le cadre de vie de demain : comprendre ce qui se passe, l’expliquer aux acteurs concernés et apporter une pierre pour que le monde de demain soit plus agréable que celui d’aujourd’hui. »
Anne-Michèle Donnet est architecte DPLG, diplômée de l’unité pédagogique d’urbanisme et d’architecture de Strasbourg au début des années 80, qualifiée par l’OPQU en 2004.
Le Parc national régional des Vosges du Nord lui offre un premier emploi en tant que chargée d’études de paysage. Elle poursuit ensuite dans cette voie au sein de l’Atelier des Sites et Paysages de Corse.
« Au cours de ma carrière, j’ai intégré l’Institut Qualité Alsace où j’ai réalisé des études sur l’identité, le paysage ou encore les couleurs, puis le CAUE 67 en tant qu’architecte conseil. J’ai pris la direction du CAUE de Moselle puis ai eu une expérience de 18 mois dans la promotion immobilière privée. Au ministère de la ville, j’ai été conseillère technique pour les maisons du citoyen : j’ai pris ensuite la direction de l’agence d’urbanisme de Moselle, puis de celle du Havre. »
Le parcours riche et varié d’Anne-Michèle Donnet l’amène à prendre en 2012 la responsabilité de l’agence d’urbanisme Sud Bourgogne. Cette agence publique a plusieurs missions : elle anime le débat local pour contribuer à l’articulation des politiques publiques et à la cohérence des projets, elle réalise des études diagnostiques et prospectives, observe les dynamiques territoriales dans une logique de connaissance et d’aide à la décision, et apporte une assistance à ses membres pour l’élaboration des documents de planification.
« Des observatoires spécialisés dans les problématiques de logement, de consommation du sol, d’économie sont mis en place et permettent d’étudier le territoire dans son ensemble. »
Sur le périmètre géographique de la Communauté urbaine de Creusot-Montceau et de la Communauté d’agglomération du grand Châlon, les neuf personnes de l’agence d’urbanisme interviennent sur des thématiques diverses.
« Nous intervenons à la demande d’une collectivité, ou sur une proposition de notre part. Nous construisons une problématique pour faire un appel d’offres et pour déterminer la façon dont nous allons travailler. Sur un même dossier travaillent plusieurs personnes: sur des dossiers de planification, très prenants, travaillent les chargés d’études transport, habitat, économie, environnement… »
Le rendu de chaque dossier est retravaillé en fonction des demandes des partenaires : les élus sont alors questionnés sur leur projet politique, leurs choix, les thématiques à mettre en avant…
« Le travail en interne est transdisciplinaire et des partenariats se nouent également avec des acteurs extérieurs: l’ADEME, ERDF, des transporteurs… Le transport est notamment un des éléments de l’urbanisme que l’on oublie trop souvent lors de la planification. Or, la façon dont les gens bougent, se déplacent, est caractéristique d’un territoire. L’objectif pour un territoire est d’offrir des moyens de se déplacer, et il faut que nous soyons capables de répondre aux collectivités sur l’évolution de leur système de transports. »
Au sein de l’agence d’urbanisme, Anne-Michèle Donnet, en tant que directrice, assure un rôle de management, veille à la défense des projets, définit le budget de fonctionnement mais aussi recrute et forme les nouveaux arrivants…
« Les agences d’urbanisme sont des viviers pour des formations en urbanisme assez variées. Les compétences recherchées sont variables en fonction des problématiques abordées (logement, transport, économie…) même si la planification reste un sujet central pour les agences: le travail spatial est important, ainsi que le travail d’analyse des données. Pour les jeunes diplômés, il faut être capable de faire une projection sur un territoire. »

SARAH COHEN, GÉRANTE DE PROGRAMMES URBAINS, AGENCE DE PROGRAMMATION URBAINE
« Dans le quotidien de l’urbaniste, la relation aux élus est très importante. Il s’agit de comprendre leurs attentes, de les écouter, de s’adapter au contexte mouvant. »
Après s’être formée à Sciences Po Grenoble, option économie sociale, Sarah Cohen décide de poursuivre par un DESS à l’Institut d’Urbanisme de Paris. En effet, au cours d’une année en Erasmus au Canada, elle a côtoyé des architectes et développé son intérêt pour la ville. Au cours de ses études, elle participe avec des architectes à un concours étudiant, qu’elle remporte.
« Les urbanistes peuvent parfois se retrouver en concurrence avec les architectes, notamment sur la compétence technique, spatiale, la capacité à dessiner et à se projeter dans l’espace. Le fait pour moi d’avoir déjà fait un concours et d’avoir eu les pieds dans un projet m’a donné une compétence opérationnelle. »
Forte de ce succès, Sarah Cohen est recrutée par un bureau d’études d’architecture et d’urbanisme où elle restera durant deux ans. Elle est qualifiée par l’OPQU en 2008.
Alors qu’elle souhaite évoluer géographiquement, Sarah Cohen s’associe en 2006 à son employeur pour monter une structure d’urbanisme, de programmation urbaine et de montage d’opérations à Chambéry. « Le fait de m’associer m’a bien aidée à me lancer. J’avais un soutien, des références et nous répondions aux appels d’offres conjointement. Je présentais donc un bagage, et c’est très important lorsqu’on monte une entreprise. »
Pour répondre à des missions et des appels d’offres de taille variable, elle travaille régulièrement en partenariat. « J’ai des collaborations régulières : je travaille toujours avec des architectes urbanistes, ainsi qu’avec une collègue urbaniste. Cela me permet de proposer plus de capacités de travail, et aussi des compétences très techniques, par exemple la VRD ou l’hydraulique… ».
Sarah Cohen travaille généralement sur des études pré-opérationnelles : une commune souhaite porter un projet sur une zone qu’elle juge stratégique et lance une consultation, à laquelle l’urbaniste va répondre en équipe, rédiger un argumentaire… Si cet appel d’offres est remporté, un travail de diagnostic est lancé, pour voir ce que le site permet de faire, pour identifier le contexte.
« De nombreuses questions se posent alors du point de vue de ma spécialité, la programmation urbaine : qu’est-ce qu’on peut programmer ? Si c’est de l’habitat, quel type de logement peut-on proposer ? Est-il possible de développer une activité économique ou commerciale ? On réalise une sorte d’étude de marché qui vise à sonder les besoins, faire des projections sur l’impact du projet sur les équipements de la commune. »
À ce moment du diagnostic, Sarah Cohen travaille avec les élus, les partenaires locaux, les promoteurs immobiliers… Dans son métier, elle développe particulièrement les contacts avec les élus, dimension qu’elle affectionne. C’est sur cette base qu’elle réalise plusieurs hypothèses pour le projet et propose différents types de programmes en fonction du scénario. Son activité peut couvrir aussi des démarches d’animation, pour aider les élus à faire des choix, des réunions publiques… Lorsqu’un scénario est retenu, il est détaillé et Sarah Cohen propose des pistes pour le mettre en œuvre : les procédures, les partenaires, le budget, les financements… Il ne faut pas mettre de côté la dimension immobilière des projets : l’urbaniste doit connaître l’ensemble du déroulement d’une opération d’aménagement, mais aussi les promoteurs, les charges foncières, le marché immobilier dans son ensemble…
« Je réalise aussi des plans d’urbanisme, des PLU : ce sont les documents qui gèrent le mode d’occupation des sols dans les communes, et qui posent le projet politique d’aménagement de l’espace des communes. Ce sont des missions que l’on mène sur deux ou trois ans : diagnostic terrain, possibilités, opportunités, souhaits des élus… et ensuite proposer la formulation d’un projet, et le traduire en un règlement. »
Les compétences développées par Sarah Cohen dans son activité sont très variées : elles couvrent l’animation, l’écoute, le partage avec les élus, la pédagogie, mais également la production des documents, des cartographies, la rédaction des textes, des notes méthodologiques, qui nécessitent des compétences rédactionnelles.
« Les capacités à travailler dans des relations partenariales, de faire de la gestion d’équipes pluridisciplinaires et transversales sont indispensables à l’activité d’urbaniste. Une parfaite connaissance du fonctionnement d’une collectivité est également nécessaire… »
Pour Sarah Cohen, le fait d’avoir sa propre structure demande beaucoup d’investissement, une pluralité de compétences, mais la liberté de travailler pour soi est extrêmement importante, et c’est un choix sur lequel elle aurait des difficultés à revenir.

LAURENT VIGNEAU, DIRECTEUR DU DÉPARTEMENT DÉVELOPPEMENT TERRITORIAL ET MOBILITÉ, ARTELIA VILLE & TRANSPORT

« Construire une ville pour qu’elle vieillisse le mieux possible, en coûtant le moins possible mais en étant toujours plus agréable à vivre : c’est un nouveau défi pour les urbanistes et c’est aujourd’hui possible grâce aux nouvelles technologies et aux nouvelles demandes des citadins. »
Ingénieur topographe depuis 1992 (École Supérieure des Géomètres et Topographes), qualifié par l’OPQU en 2011, Laurent Vigneau se définit comme urbaniste et ingénieur des territoires.
Une première opportunité d’emploi se présente à lui en 1994 chez Sogelerg-Sogreah, devenue aujourd’hui Artélia: l’entreprise d’ingénierie le recrute afin de travailler sur les plans d’aménagement du territoire et les enjeux des mobilités.
« Dans le domaine des mobilités, j’ai pu mettre à profit et adapter mon bagage de topographe : j’ai assisté à l’arrivée des plans de déplacement urbain, des premières études d’impacts calibrées par la loi sur l’air et des projets urbains précurseurs… le monde des transports s’ouvrait à l’époque à l’environnement et à l’urbanisme pour inventer ce qui est devenu aujourd’hui le tramway à la française ou la french touch urbaine que beaucoup de pays nous envient. »
Au cours de son parcours professionnel, Laurent Vigneau saisit des opportunités et développe ses compétences. Il participe notamment à un concours en Polynésie, et part s’y installer pour développer une agence d’Artélia sur place.
« Le métier d’urbaniste est tellement polyvalent et ouvert, il n’est pas rare d’avoir ce genre d’opportunités, des marchés imprévus qui peuvent changer votre vie : il n’y a rien de routinier et chaque client, chaque mission réinterrogent l’ensemble de sa carrière et de ses connaissances. Pour ma part, l’expérience des îles soumises à de fortes pressions démographiques a consolidé mon laboratoire technique et méthodologique sur l’idée que l’on peut occuper l’espace sans perturber son environnement naturel, physique et humain : un sacré challenge à chaque fois, quelle que soit la taille du projet. »
Sa carrière se poursuit sur l’île de la Réunion, où il s’occupe du projet du tram-train et de ses effets sur les villes qu’il dessert tout en développant les projets urbains. De retour en métropole, Laurent Vigneau prend la direction du département Développement territorial et Mobilités chez Artelia : « mon équipe est composée de 40 personnes d’horizons très divers. Nous réalisons des études en amont sur l’optimisation des villes et des territoires. L’activité se structure autour de quatre pôles, qui travaillent néanmoins de façon transverse : mobilités, environnement, management des projets urbains et tourisme loisirs et culture. Nous essayons de travailler comme si on était une ville : chacun a ses compétences, ses passions et ses convictions, mais c’est tous ensemble qu’on fait les meilleurs projets. »
Le déroulement d’une mission commence généralement par la réponse à un concours ou à un appel d’offres. L’ingénieur-urbaniste se charge ensuite d’optimiser le projet et sa réalisation. Un plan guide est formalisé, et une esquisse des ambitions politiques est réalisée. De nombreuses études et expertises viennent alimenter la démarche : études de programmation, d’environnement et de mobilité…L’activité va du conseil au projet, de la formation à l’animation de conférences.
« La plupart de nos clients sont des maîtres d’ouvrages publics : nous travaillons également sur des projets de rénovation urbaine ou pour des bailleurs sociaux. Il s’agit d’accompagner les clients, les collectivités, à la fois dans les études et dans le montage du projet. Notre rôle principal est d’assurer la qualité maximale des projets, mais aussi qu’ils se réalisent avec tous les acteurs, les délais et les enjeux financiers à considérer. »
Les clients d’Artélia et de Laurent Vigneau peuvent être des communes, des communautés de communes, des départements, des régions… Les collaborations extérieures sont également très importantes : avec des architectes, des paysagistes et des spécialistes (faune et flore, analyse des sols…). L’ingénieur urbaniste se transforme alors en manager urbain, sorte de chef d’orchestre d’équipes complexes travaillant à plusieurs mains sur la fabrication de la ville et des projets urbains.
Au fil de son parcours, Laurent Vigneau a vu les demandes des clients évoluer : le contexte politique changeant a transformé les besoins et les marchés, tandis que l’enjeu de la ville et des territoires est devenu omniprésent.
« Les appels d’offres sont plus transversaux, plus personnalisés, plus globaux… notre rôle principal est d’offrir à nos clients les méthodes et les moyens pour manager le changement très rapide de la ville et des besoins des habitants. A ce titre, nous faisons beaucoup de recherche et de développement sur la ville durable et la ville de demain. Nous essayons aussi de devancer la demande de nos clients et c’est pour cela que nous intégrons par exemple l’économie touristique, les loisirs et la culture au cœur de nos études urbaines : je suis convaincu qu’il s’agit là de l’enjeu majeur de la ville contemporaine et qu’il faut capitaliser cette économie – la seule où la France est championne du monde. »
En tant que directeur d’un département, un tiers du temps de Laurent Vigneau est consacré à la relation avec les clients, une fois que les missions ont été remportées. Un autre tiers de son activité consiste à répondre aux appels d’offres ou à faire connaître son équipe et son métier, et le tiers restant est consacré au management des ressources humaines.
Au sein de son équipe, il insiste sur l’importance du suivi de la mise en œuvre des projets :
« il va y avoir des débouchés pour le management de projet urbain, l’urbaniste réellement opérationnel… mais également sur l’exportation du savoir-faire français sur la ville, à l’étranger. La thématique de la ville durable par exemple est un sujet qui va prendre encore plus d’ampleur, en France comme à l’international. Nous vivons dans un pays incroyable qui a une longue histoire urbaine, des villes de toutes tailles, un maillage du territoire très optimisé. Si l’on ajoute nos villes tropicales et l’art de vivre que tout le monde nous envie, il n’y a aucun doute sur l’essor annoncé des métiers de l’urbanisme à la française en tant que référence mondiale, avec tous les développements que cela implique. Les grandes ingénieries nationales comme Artélia sont prêtes pour relever le défi planétaire de la ville et des territoires durables. »