Instauration et protection du titre d’urbaniste
L’urbanisme
une définition
L’urbanisme nécessite un socle de compétence, la maîtrise de l’ « Ensemble des sciences, des techniques et des arts relatifs à l’organisation et à l’aménagement des espaces urbains, en vue d’assurer le bien-être de l’homme et d’améliorer les rapports sociaux en préservant l’environnement. »[1], y compris la transversalité entre ces techniques ainsi que leur analyse critique, et en intégrant la dimension éthique. Etant donné l’étendue du champ, l’urbanisme reste une discipline ouverte, par et vers la recherche et les techniques nouvelles, par et vers d’autres professions, par et vers la coopération et la concertation citoyennes.
L’urbain, la ville et le territoire
La population et ses représentants politiques, les acteurs économiques et sociaux, les associations et de nombreuses professions ont toute légitimité à dire ce qu’ils et elles attendent des espaces où ils habitent ou travaillent, à participer à l’organisation de ces espaces, à leur gestion et à leur avenir. C’est la vie urbaine.
Les services de l’Etat, les collectivités territoriales, les élus, des professions qui travaillent dans la ville et pour la ville, ingénieurs, architectes, géomètres, juristes, développeurs divers, utilisent trop souvent le mot urbanisme pour désigner l’état général de l’urbain ou l’un des champs de leur propre compétence.
Or, l’urbanisme est une discipline professionnelle, le mot a été forgé en même temps que cette science de l’action. La ville et le territoire sont ses objets, dans toutes leurs dimensions mêlées, sociales, spatiales, économiques, techniques… L’urbanisme repose sur un corpus de savoirs établis et sur des méthodes avérées. Il est exercé par les urbanistes. L’instauration d’un titre d’urbaniste est nécessaire à la pleine reconnaissance de l’urbanisme comme discipline professionnelle.
Le titre d’urbaniste
Dans de nombreux pays, l’exercice de l’urbanisme est fortement encadré. Il est de mieux en mieux défini en Europe et est engagé dans des processus internationaux de reconnaissance mutuelle.
La France est historiquement l’un des premiers pays à avoir défini l’urbanisme et la profession d’urbaniste, la profession dispose de nombreuses associations, d’une qualification professionnelle d’urbaniste et d’un enseignement universitaire mention aménagement et urbanisme. Cependant la profession reste peu reconnue par les Collectivités et par l’Etat, et souffre de ce fait de difficultés, d’une structuration inachevée et d’une absence de statut.
Reconnaissances préalables en France
Reconnaissance sur critères par les pairs : l’urbaniste SFU.
En 1911, la Société Française des Urbanistes, (SFU) est constituée, « ce mot ayant finalement été choisi[2] pour désigner les praticiens de la discipline nouvelle. » A partir de 1920 selon les statuts[3], la SFU réunit « des membres sociétaires français ou étrangers, techniciens expérimentés dans les plans de composition des villes et dans les vues et conceptions générales de l’urbanisme [et] des membres correspondants […] économistes, ingénieurs, écrivains ou architectes, versés dans l’un des points particuliers de l’urbanisme ». Les membres sont acceptés sur présentation par deux sociétaires et vote au scrutin secret. Plus tard, la SFU définit les taches de l’urbanisme, la formation nécessaire et la liste des établissements reconnus[4]. Elle recrute alors ses membres sur critères de formation et d’expérience professionnelle et les autorise à porter le titre « urbaniste SFU »
L’Urbaniste de l’Etat et l’Architecte-urbaniste de l’Etat
Le corps des « Urbanistes de l’état » est créé en 1962. Il devient celui des « Architectes-urbanistes de l’Etat » avec l’intégration des Architectes des bâtiments de France en 1993. Le corps est divisé en deux spécialités, urbanisme-aménagement et patrimoine architectural, urbain et paysager. Dans leur très grande majorité, ils sont titulaires d’un diplôme en architecture, ainsi que d’une spécialisation en urbanisme et aménagement pour ce qui concerne la première spécialité. Le concours et leurs formations internes après concours comportent des contenus urbanistiques. Les Architectes-urbanistes de l’Etat interviennent dans le cadre des politiques d’Etat liées à l’urbanisme, l’aménagement, le logement, l’architecture et la construction, le patrimoine, les espaces protégés et l’environnement.[5]
L’urbaniste territorial
A partir des années 1980, des collectivités importantes, avec des services d’urbanisme conséquents se dotent « d’urbaniste territoriaux » chargés d’examiner de façon transversale les questions d’urbanisme dans un territoire donné.
Sans qu’il s’agisse d’un titre ni d’un grade, la désignation de leur poste marque une reconnaissance publique officieuse de leur profession et de leurs compétences. On notera par contre que le plus souvent ni les responsabilités de directeur de service urbanisme ou de service instructeur, ni les autres responsabilités secondaires dans ces services ne sont dotées d’une appellation « urbaniste ».
L’urbaniste qualifié par l’Office Professionnel de Qualification des Urbanistes
L’Office Professionnel de Qualification des Urbanistes(OPQU), association de la loi 1901, a été créé le 3 mars 1998, avec le soutien de l’Association des Maires de France et de l’Etat pour assurer une mission de service public, dans le cadre d’un protocole (récemment renouvelé) signé le 22 juillet 1998 avec les associations d’Urbanistes APUCT, AUDE, SFU, FNAU, FNCAUE et FNC PACT-ARIM, réunies dans la confédération du CFDU et le Ministre en charge de l’Urbanisme.
La qualification d’urbaniste est attribuée sur critères de formation et d’exercice professionnel. Ces critères, portés au règlement intérieur, ont été récemment réévalués en lien avec l’association APERAU qui regroupe les formations francophones à l’aménagement et à l’urbanisme. L’OPQU a établi en 2015 la Déontologie des urbanistes. La qualification par l’OPQU est devenue un critère de qualité pour l’exercice professionnel. Elle n’a pas encore d’effet officiel pour la sélection d’un candidat ou d’une offre et n’est pas encore un titre, cependant, c’est la première et la seule reconnaissance officielle et généraliste de la profession.
Aujourd’hui, toutes les conditions nécessaires à l’instauration du titre d’urbaniste sont potentiellement réunies :
- des formations spécifiques en urbanisme,
- ces formations et l’expérience professionnelle donnant accès au titre d’urbaniste par la qualification d’urbaniste délivrée par l’OPQU,
- le référentiel des métiers exercés par les urbanistes,
- la déontologie professionnelle des urbanistes,
- l’histoire prégnante de la profession en France et sa reconnaissance internationale.
Une profession ouverte
Fidèle à son histoire, la profession d’urbaniste reste ouverte par la qualification à toutes les compétences nécessaires à l’organisation et à l’aménagement des espaces urbains et des territoires.
La qualification d’urbaniste est délivrée par l’OPQU aux professionnels titulaires d’un diplôme en aménagement et urbanisme et aussi aux professionnels issus d’une formation proche (architecture, ingénierie, paysage, environnement, sciences humaines) qui ont fait par leur expérience professionnelle le chemin vers l’urbanisme. Ceux qui font valoir leur seule expérience professionnelle peuvent, préalablement à leur qualification, faire une démarche de validation des acquis de l’expérience auprès de l’une des formations inscrites au RNCP.[6]
L’urbanisme n’est pas une profession règlementée à l’ancienne, avec une formation tuyau et un marché protégé. L’urbanisme s’inscrit pleinement dans la pluralité contemporaine des enseignements et des métiers. Son enseignement participe aux interactions universitaires nationales et internationales, il conduit à l’exercice professionnel de l’urbanisme ou à la recherche en urbanisme. La profession est ouverte aux échanges et aux évolutions futures de l’urbanisme.
L’instauration du titre d’urbaniste et la reconnaissance de l’urbanisme sont possibles aujourd’hui, dans le respect de l’ouverture de la profession d’urbaniste, sans attendre l’établissement d’un diplôme d’Etat ni d’une profession réglementée.
Les urbanistes demandent à l’Etat :
- La reconnaissance de l’urbanisme comme discipline professionnelle spécifique, et l’usage de ce mot dans les textes administratifs selon son sens principal (et non pour désigner l’urbain en général ou le cadre de vie)[7].
- Le renforcement du mandat de service public de l’OPQU[8] et l’établissement d’un mandat semblable pour l’APERAU[9] appelées à définir le socle de compétence de l’urbanisme,
- L’instauration d’un titre d’ « urbaniste » attribué aux candidats qualifiés par l’OPQU, suivant les critères de formation et d’exercice professionnel définis par ce même organisme,
- La définition, sans exclusive, d’un marché public et d’un cadre d’emplois publics et privés,
- Et pour enclencher la dynamique, l’exemplarité de la commande publique : l’exigence par l’Etat et par les collectivités territoriales que figure la référence au titre d’urbaniste dans tout appel d’offre, attribution de marché ou mission propre à l’urbanisme.
[1] http://www.cnrtl.fr/definition/urbanisme Le Centre national de ressources textuelles et lexicales, a été créé par le CNRS, en 2005.
[2] (par André BERARD, selon un témoignage de Jean ROYER – revue urbanisme n° 77 p.2 – 1962). Voir aussi l’étymologie du mot urbaniste dans la définition du CNRTL, l’origine du mot est rapportée à la création de la SFU en 2011.
[3] Lire les statuts de 1920 : http://www.urbaniste.com/wp-content/uploads/2016/05/Statuts-SFU-1920.pdf
[4] Ces définitions, en annexe aux statuts, font maintenant référence au Conseil Européen des Urbanistes, à l’Office Professionnel de Qualification des Urbanistes et à l’Association pour la Promotion de l’Enseignement et de la Recherche en Aménagement et Urbanisme
[5] http://a-aue.fr/ . Un rapport de 2013 préconise d’ouvrir à nouveau le corps des AUE aux urbanistes diplômés.
[6] Répertoire National des Certifications Professionnelles : www.rncp.cncp.gouv.fr/
[7] www.urbaniste.com/urbanisme-definition/
[8] Office Professionnel de qualification des urbanistes : www.opqu.org
[9] Association des formations en aménagement et urbanisme : www.aperau.org